Test Cricut Joy Xtra : une machine de découpe honnête avec un logiciel casse-tête

Test Cricut Joy Xtra : une machine de découpe honnête avec un logiciel casse-tête

Destinée aux créatifs amateurs comme professionnels, la Joy Xtra est le modèle de milieu de gamme de Cricut, l'un des grands spécialistes des machines de découpe. Mais si l'appareil est séduisant, son logiciel est agaçant.

Qu'ils soient amateurs ou professionnels, les créatifs spécialisés dans des travaux et les arts manuels peuvent aujourd'hui s'appuyer sur plusieurs appareils "informatiques" pour pour matérialiser leurs idées et leurs œuvres. En plus des traditionnelles et incontournables imprimantes, qui permettent de fixer sur papier – mais aussi sur d'autres s – des textes, des images, des logos et toutes sortes de graphismes en deux dimensions, et des imprimantes 3D qui servent à modeler de véritables objets en plastique, ils peuvent depuis quelques années utiliser des machines de découpe. 

Comme leur nom le suggère, ces appareils permettent de découper des motifs dans divers matériaux (papier, carton, feutre, plastique, vinyle, tissu, cuir, bois, etc.). Leur principe est simple, et très proche de celui d'une imprimante : il suffit, avec un logiciel sur ordinateur ou une appli sur smartphone, d'indiquer le motif à découper, d'insérer le matériau dans la machine et de la laisser effectuer une coupe nette et précise grâce à une lame adaptée. Un gain de temps et de précision considérables pour tous les travaux de découpe un peu fastidieux. Et  ces machines ne s'arrêtent pas là : en changeant l'outil de la machine, on peut aussi dessiner, dorer, corner, embosser… Bref, une myriade de possibilités dans les domaines de l'illustration, du scrapbooking, de la customisation et des arts créatifs manuels en général pour réaliser des créations personnalisées (stickers, étiquettes, cartes, mugs, vêtements, boîtes cadeaux,  pancartes, banderoles, décoration en bois, etc.)

© Cricut
© Cricut

Comme sur le marché des imprimantes, quelques constructeurs se sont ainsi spécialisés dans les machines de découpe, en proposant notamment des modèles accessibles au grand public. C'est le cas de l'Américain Cricut qui dispose actuellement dans sa catalogue de plusieurs modèles aux capacités différentes. La plus petite et la plus abordable est la Joy, proposée à 180 euros, tandis qu'en haut de gamme, la Maker 4, affichée à 450 euros permet de découper jusque la largeur d'un format A3. Si les tailles et performances diffèrent, toutes les machines permettent de réaliser pléthore de projets, allant de la personnalisation d'accessoires à la réalisation de stickers en ant par le scrapbooking ou des pop-up en papier.

Le credo de Cricut, c'est de "booster la créativité en donnant vie aux idées". Pour voir si cette belle promesse est tenue, nous avons testé durant plusieurs semaines Joy Xtra, un modèle compact de milieu de gamme vendu 230 euros qui permet de réaliser divers projets simples, et qui semble adaptée aussi bien aux amateurs ionnés qu'aux professionnels, en étant capable de découper une cinquantaine de matériaux. Voici notre verdict.

© Cricut
Cricut Joy Xtra : l'avis de CCM
  • Design compact et élégant
  • Installation simple
  • Fonctionnement silencieux
  • Variété des matériaux pris en charge
  • Bien adaptée aux découpes simples
  • Nombreuses ressources en ligne
  • Logiciel mal fini et peu pratique pour les projets complexes
  • Nombreuses fonctions payantes
  • Précision aléatoire

Cricut Joy Xtra : une machine compacte et silencieuse

© Léna Mée - Lenacadabra

La Joy Xtra est livrée dans un emballage robuste et parfaitement maintenue pour éviter tout risque de casse pendant le transport. Son kit de départ comprend la machine elle-même avec son adaptateur secteur, une lame à pointe fine, un stylo à pointe fine, ainsi qu'une enveloppe d'échantillons de divers matériaux estampillés Cricut afin de réaliser de premiers projets. L'achat donne également droit à un essai gratuit à Cricut Access, un service en ligne sur abonnement payant (voir plus loin).

© Léna Mée - Lenacadabra

Niveau poids et dimensions, la Cricut Joy Xtra sait se faire discrète à première vue : pesant 2,7 kg, et mesurant 31,7 x 15,2 x 13,9 cm, elle est plus compacte qu'une petite imprimante. Elle se fond d'ailleurs très bien dans la déco, avec sa coque blanche et son design épuré. Attention cependant : pour fonctionner, elle a besoin d'espace devant et derrière, ce qui est à prendre en compte au moment de choisir son emplacement. L'espace à prévoir dépend des projets et du matériel ; pour une découpe avec tapis, l'équivalent de la longueur d'une feuille A4 est suffisant, mais la machine est techniquement capable de découper jusqu'à 1,20 m ! Autre conseil quant à son emplacement : la Joy Extra ayant besoin d'un bon éclairage pour scanner ses différents repères, il faut veiller à ne pas la placer dans un endroit trop sombre.

© Léna Mée - Lenacadabra

Cricut Joy Xtra : une installation très simple

Côté interfaces, la Joy Xtra fait dans le strict minimum : elle ne possède ni prise USB ni port Ethernet, ni même de Wi-Fi, juste du Bluetooth, pour sa liaison avec un ordinateur, un smartphone ou une tablette. Son installation est ainsi simple et fluide : il suffit de la relier à une prise secteur, d'insérer l'outil souhaité (le plus souvent, la lame à pointe fine) dans l'emplacement prévu à cet effet, puis de l'appairer à un ordinateur ou un smartphone via Bluetooth. Selon l'appareil utilisé, Il faut aussi installer le logiciel ou l'appli associée à la machine, Cricut Design Space.

© Léna Mée - Lenacadabra

Cricut Design Space propose d'emblée de se familiariser avec la découpeuse : grâce à une feuille de vinyle autocollant incluse dans le kit de démarrage, on peut découper en un rien de temps le logo Cricut, et constater l'efficacité et la puissance de la machine.

Une très bonne surprise constatée lors de ce test concerne la nuisance sonore de la machine. Nombreux sont les utilisateurs qui ne ent plus le bruit des différentes machines de découpe. Force est de constater, en regardant quelques tutos sur YouTube, que le bruit est en effet fort, et très désagréable, surtout sur la durée. Cependant, la Joy Xtra est particulièrement silencieuse, pas plus bruyante qu'une imprimante à jet d'encre. Un très bon point !

Lame à pointe fine © Léna Mée - Lenacadabra

Avant de se lancer dans un premier projet, le logiciel invite tout d'abord à calibrer la machine : une étape essentielle pour une découpe précise des projets, notamment pour ceux effectués en "print and cut" (imprimer puis découper, n français), une technique très populaire auprès des utilisateurs de la marque. Pas de panique, toutes les étapes pour effectuer cette manipulation sont clairement expliquées par le logiciel qui nous guide pas à pas. Il faut tout d'abord imprimer une feuille de calibrage avec une imprimante classique, puis la coller sur le tapis de découpe.

© Léna Mée - Lenacadabra

Le tapis de découpe est un  en plastique souple et robuste, recouvert d'une grille de placement et d'un léger film autocollant, qui sert à maintenir le matériau à découper bien en place. C'est est un accessoire quasiment indispensable pour l'immense majorité des projets et qui n'est malheureusement pas inclus avec l'achat de la machine seule. En effet, les matériaux les plus utilisés, comme des feuilles autocollantes ou les papiers cartonnés, auront besoin d'être fixés à un . Cricut a cependant créé une gamme "Smart", qui permet aux matériaux d'être directement insérés dans la machine, sans nécessiter de tapis en guise de . Ces matériaux sont disponibles sur la boutique de la marque, mais peuvent vite représenter un budget important. Toujours sur la boutique, on trouve les fameux tapis compatibles, pour 14 euros pièce, ou choisir le kit machine avec des matériaux à 503 euros lors de l'achat pour profiter de deux tapis et d'une large quantité d'outils et accessoires.

Une fois la feuille de calibrage imprimée, il faut la positionner sur le tapis. Le logiciel invite ensuite à insérer le tapis avec la feuille de calibrage dans la découpeuse, qui se met alors au travail, en scannant les différents repères et effectuant des découpes de test. Un opération très similaire à la calibration d'une imprimante. Une fois la feuille test découpée, le logiciel demande simplement de lui indiquer les découpes qui ont été les plus précises. Et voilà : tout est prêt en principe pour réaliser des projets personnels !

© Cricut Design Space

Cricut Joy Xtra : une bibliothèque riche en exemples

Si l'on manque d'inspiration, Cricut a de quoi donner des idées dans sa bibliothèque de projets proposés à l'ouverture du Cricut Design Space. En effet, dans la colonne gauche de la fenêtre, on trouve les onglets "Découvrir" et "Trouver l'inspiration", regorgeant tous deux de projets prêts-à-l'emploi. Certains sont gratuits, d'autres payants à l'unité ou accessibles via l'abonnement Cricut Access, à 9,99 euros par mois ou 99,99 euros par an : une formule qui donne un accès illimité à des images, des polices de caractères et des projets prêts à l'emploi.

Si on peut saluer la grande quantité de projets disponibles, notons tout de même que la diversité stylistique est assez limitée : beaucoup de fleurs, de papillons, de citations plus ou moins kitsch à la "Live, Love, Laugh"… Bref, pour sortir un peu des sentiers battus et des années 2010, il faut se retrousser les manches.

© Léna Mée - Lenacadabra

Le plus simple pour commencer, reste d'utiliser les fameux matériaux "Smart" proposés par la marque, combinés à des formes de découpe très simples. Pour ce faire, il suffit de cliquer sur "Nouveau projet" puis sur "Toile personnalisable" pour se retrouver face à un plan de travail quadrillé vierge,. Dans la colonne de gauche, on a alors accès à une bibliothèque de formes et d'images, à importer sur notre toile. Comme pour les projets prêts-à-l'emploi, certains éléments sont gratuits, d'autres payants ou disponibles via le Cricut Access.

Si les formes de base gratuites ne suffisent pas, des sites comme Playground.com sont particulièrement appréciés par les utilisateurs de la marque qui souhaitent personnaliser des modèles sans payer un abonnement Cricut Access. Autre option : créer soi-même une forme de découpe via un logiciel tiers, Design Space acceptant les principaux formats graphiques (JPEG, PNG, BMP, GIF, SVG et DXF et HEIC). 

Vinyle autocollant doré transféré sur un miroir © Léna Mée - Lenacadabra

Une fois la forme importée, on indique les dimensions souhaitées, et on se laisse guider en cliquant sur le bouton "Créer". Une nouvelle page guide alors étape par étape pour la réalisation du projet. Un "plan d'action" numéroté permet de choisir les options à appliquer à la  découpe : du matériau utilisé, à la puissance de la coupe. Le logiciel invite ensuite à insérer le matériau puis la machine s'assure d'avoir assez de place à l'avant et à l'arrière pour faire circuler la feuille librement,. Il ne restes plus qu'à cliquer sur "Go" et regarder la machine travailler !

© Léna Mée - Lenacadabra

Cette première façon de faire permet de réaliser facilement et rapidement des découpes simples sur des matériaux basiques. Nous avons testé le vinyle autocollant blanc, ainsi que sa version dorée, tous deux appliqués par la suite sur des miroirs. Sur le projet de lettrage ci-dessous, nous avons eu besoin d'outils supplémentaires : d'abord, un outil pointu permettant de retirer les parties non désirées (humblement appelé "dispositif d'élimination" sur la boutique Cricut), puis, d'un autocollant de transfert. Une fois la phrase découpée et nettoyée, il a fallu coller le transfert sur le vinyle, pour pouvoir ensuite recoller l'ouvrage sur le souhaité. Ne reste plus qu'à retirer délicatement l'autocollant transfert pour irer le résultat.

Vinyle autocollant blanc transféré sur un miroir © Léna Mée - Lenacadabra

Cette technique très connue et appréciée permet de personnaliser à foison une foule de s, des pots à épices aux bouteilles en inox, en ant par de la papeterie, des meubles jusqu'aux coques de téléphone. Il y a déjà de quoi s'am.

En remplaçant la lame à pointe fine faite pour la découpe par un des autres outils disponibles, comme les feutres ou l'outil de dorure, il est possible de pousser encore plus loin la customisation. La JoyXtra ne dispose que des fonctions de découpe, dessin et dorure, mais les modèles plus haut de gamme offrent davantage de possibilités, notamment avec l'embossage.

Cricut Yoy Extra : un logiciel hors normes et pénible

Pour aller plus loin que ces premiers projets personnalisés que la Joy Extra réalise sans mal, il faut utiliser la fameuse option "print and cut", une fonction particulièrement prisée des illustrateurs. Et on comprend pourquoi : avec une découpeuse, la réalisation de stickers, de cartes pop-up ou d'éléments de packaging devient beaucoup plus accessible. Plus besoin de er par des fournisseurs avec des minima de commandes disproportionnés pour les artistes qui se lancent. La Joy Extra permet d'imprimer d'abord sa création avec une imprimante classique, puis d'effectuer une découpe sur la feuille précédemment imprimée. Cette possibilité élargit encore davantage le champ des possibles créatifs, sans sortir de chez soi ou er par un prestataire !

© Léna Mée - Lenacadabra

Nombreux sont ainsi les artistes qui se précipitent chez Cricut, remplis d'espoir. Hélas, c'est là que la lune de miel commence à tourner au vinaigre… En effet, pour des raisons obscures et assez incompréhensibles, Cricut a fait le pari de se démarquer des logiciels de mise en page et de création graphique classiques, comme ceux de la suite Adobe (Illustrator, Photoshop, inDesign) ou de Canva, qui sont pourtant des intournables dans ce domaine. Un pari ambitieux,, et surtout, perdu : à cause de son interface hors normes, l'utilisation du logiciel Design Space n'est ni intuitive, ni logique, ni simple.

Il serait difficile d'énumérer tout ce qui ne va pas Design Space tant tout est à revoir : de l'importation des fichiers aux options de mise en page en ant par la navigation… C'est la douche froide. On voit les possibilités techniques de la machine sans comprendre comment les exploiter. C'est le moment de prendre une camomille et de respirer un grand coup avant de se lancer dans un véritable parcours du combattant.

Prenons un exemple concret. Pour commencer, nous avons voulu réaliser des stickers ronds contenant un logo à partir d'une feuille A4. En toute logique, nous avons préalablement créé notre mise en page dans un autre logiciel, pour importer ensuite notre image au format A4 dans Design Space.

La logique voudrait qu'ensuite, nous utilisions les formes de découpe basiques disponibles en sélectionnant un rond et en le plaçant au dessus de notre design. Sauf que dans la logique Cricut, toutes les formes de découpes sont remplies d'un aplat de couleur opaque. Autrement dit, on ne peut pas voir ce qui se trouve derrière la forme, et il est donc difficile de centrer parfaitement notre cercle sur notre logo. Pourquoi ne pas simplement signifier la forme de découpe avec un liseré coloré ? La question reste en suspens.

© Cricut Design Space

À force de fouiner, nous trouvons l'astuce : une fois notre forme sélectionnée, il faut aller dans le menu déroulant "Opération", et cliquer sur "Guide", afin de transformer cette forme opaque en un simple filet coloré. Attention cependant, une fois positionné, il faudra le reer en "Découpe de base" pour que la forme soit réellement découpée !

© Cricut Design Space

Une fois ce constat fait, nous réalisons qu'il risque d'être très long d'aligner manuellement et correctement tous nos cercles sur les nombreux logos de notre feuille. Alors, malins, nous préférons importer directement notre logo individuel, caler la forme de découpe par dessus, puis dupliquer l'ensemble.

Oui mais ! En important notre logo au format Jpeg avec un fond blanc, nous réalisons que la machine considère la forme de base de notre image comme un trait à découper. Autrement dit, en procédant ainsi, la machine découperait la forme ronde choisie mais également le contour de notre image. Pas de panique, nous commençons à comprendre la machine – que nous croyons… Il suffit donc de er notre image en PNG sur un fond transparent, et le tour est joué !

Mais Cricut, encore une fois, ne pense pas comme un graphiste. Nous importons donc notre logo avec un fond transparent, toujours dans l'optique d'appliquer une découpe ronde par dessus, mais la machine en a décidé autrement. En effet, son option "imprimer puis découper" est indivisible. C'est à dire que dès lors que l'on importe une image à imprimer, elle découpera, quoi qu'il arrive, autour des pixels de cette image. De fait, si nous lançons notre découpe en l'état, la Cricut découpera nos formes rondes, mais également tout le contour de notre logo. À ce stade, la camomille n'est déjà plus suffisante.

Stickers festonnés © Léna Mée - Lenacadabra

Après ces essais infructueux, nous avons enfin commencé à comprendre la logique de Cricut. Voici donc la façon la plus simple d'exécuter ce projet : sur notre logiciel de création graphique habituel, nous avons créé notre image au format PNG (avec un fond transparent donc), mais en y ajoutant un fond dont la forme est celle que nous souhaitions découper. Sur l'exemple en photo, pour réaliser ces étiquettes festonnées, il a donc fallu importer des PNG qui avaient déjà la forme de découpe souhaitée. Intuitif, non ? Et malheureusement, nous n'étions pas encore au bout de nos peines.

© Cricut Design Space

Maintenant que nous avons nos images PNG parfaitement créées pour l'occasion, nous commençons à les placer sur notre toile. Nous organisons tranquillement notre mise en page, en nous aidant de la grille qui apparaît par défaut sur l'écran pour être sûr que tous les éléments rentrent dans le format souhaité (pour la Joy Xtra, on est sur une largeur maximum de 20 cm).

Une fois quelques cheveux arrachés pour aligner et arranger nos éléments correctement afin que tout e, nous cliquons enfin sur "Créer" pour continuer notre projet. Et là, malheur : notre belle mise en page a été complètement bousculée ! Plus rien n'est à sa place, certains éléments sont même és sur une autre page, alors qu'il y a suffisamment de place pour tout faire rentrer sur une seule feuille, si seulement Design Space avait daigné respecter notre mise en page…

Et comme si ce n'était pas suffisant, nous réalisons au même moment que nos calculs pour tout faire tenir sur notre feuille ne fonctionnent pas, car pour que la fonction "Imprimer puis découper" fonctionne, le logiciel est obligé d'intégrer des repères aux quatre coins de notre feuille, repères qui nous font perdre entre 2 et 3 cm de largeur de document.

© Cricut Design Space

Pour résoudre ce nouveau problème, il faut donc penser autrement, car ce qui semble logique à un graphiste ordinaire ne l'est pas dans l'univers Cricut. Pour que notre mise en page soit "figée", il faut d'abord prendre soin de sélectionner tous les éléments et de les "attacher" via l'option correspondante.

Et c'est le moment idéal pour parler du choix des noms d'options de mise en page du logiciel. Sans doute toujours dans cette volonté de se différencier, les noms d'options que l'on retrouve habituellement dans les logiciels de création graphique et qui sont rentrés dans l'inconscient collectif, sont différents dans le Design Space ; et la terminologie choisie est parfois troublante, quand elle n'induit pas carrément en erreur. Quelle différence faire entre les options "Associer", "Attacher" et "Grouper" ? Ces synonymes n'ont pourtant pas du tout le même effet sur notre toile. Et ce n'est malheureusement pas le seul problème sémantique, comme le prouve, par exemple, la confusion entre un bouton intitulé "Lancer" quand l'instruction indique de cliquer sur "Démarrer"… 

Un des nombreux exemples du manque de soin apporté au logiciel © Cricut

Ces petits loupés de traduction témoignent pour le moins d'un manque cruel de réflexion et de sérieux dans la conception et dans la finition du logiciel de Cricut, élément pourtant clé car indispensable dans le pilotage de la machine. Et ils font perdre un temps précieux sur un projet aussi simple qu'une découpe de stickers.

Ces problématiques liées au Cricut Design Space altèrent malheureusement en profondeur toute l'utilisation de la machine. Sur le marché des machines de découpe, Cricut a rapidement gagné en popularité. En conséquence, les prix des machines et matériaux Cricut sont plus élevés que la marque concurrente directe, Silhouette. En effet, chez cette dernière, l'équivalente de la Joy Xtra, la Silhouette Portrait 4, est actuellement affichée à 200 euros. Dès lors, si les caractéristiques des deux machines sont similaires, on pourrait s'attendre à ce que la différence de prix soit justifiée par la qualité et l'ergonomie du logiciel Cricut.

Or, vous l'avez compris, il n'est pas possible de considérer Design Space comme un argument pesant en faveur de Cricut. Vu notre expérience sur ordinateur, nous n'avons d'ailleurs même pas osé nous lancer sur la version mobile du logiciel, sur laquelle il nous semble impossible d'être précis. D'innombrables témoignages d'internautes désabusés sont d'ailleurs facilement trouvables en ligne, partageant les nombreux écueils relatifs à Design Space.

Cricut Joy Xtra : une communauté active et utile

La communauté Cricut est d'ailleurs un des grands points forts de la marque, même si elle n'en est pas responsable : à force de mésaventures, les utilisateurs ont fini par partager de nombreuses astuces en ligne, souvent bien plus utiles que les tutoriels officiels proposés par le constructeur. En effet, les créatifs du monde entier ont souvent rencontré les mêmes déboires, et des comptes TikTok et YouTube dédiés à la marque et à ses produits ont fini par émerger. Nous ne saurons que trop recommander d'aller consulter le travail honorable de ces particuliers qui ont sans nul doute é de longues heures à dompter leur machine pour que nous puissions en récolter les fruits.

C'est d'ailleurs grâce à une youtubeuse du nom de LilyRose Craftroom que nous avons pu poursuivre un projet que nous attendions avec impatience : créer des planches de stickers. C'est l'une des utilisations les plus répandues avec les machines de découpe ; la possibilité d'imprimer une feuille autocollante qui sera ensuite découpée à mi-chair, de façon à pouvoir décoller le sticker facilement. Une fonction que la Joy Extra est tout à fait capable de gérer… mais pour ce faire, il faut souscrire à l'abonnement Cricut Access. Oui, vous avez bien lu, pour avoir accès à une fonction comprise dans la machine, et qui fait partie des utilisations de base de cette dernière, les clients Cricut doivent, en plus du prix de la machine, de ses accessoires, des matières premières, payer un abonnement mensuel de près de 10 euros.

Fort heureusement, nous étions assis et avions déjà un bon litre de camomille dans l'organisme quand nous avons découvert cette drôle de façon de faire. Imaginez vous acheter un réfrigérateur, haut de gamme, qui dispose du très apprécié distributeur de glaçons et glace pilée. Alors un après-midi de canicule, vous vous réjouissez à l'idée d'utiliser cette fonction, avant de vous rendre compte que pour y avoir accès, vous devez payer un abonnement mensuel supplémentaire. L'idée est capillotractée : votre machine est techniquement capable de le faire, vous l'avez peut-être même achetée spécifiquement pour ça… mais la machine refa de vous laisser utiliser cette fonction.

Planche de stickers et découpe "mi-chair" © Léna Mée - Lenacadabra

Fort heureusement donc, grâce à la communauté Cricut qui ne manque pas de ressources ni d'idées (c'est bien la force des créatifs) et qui n'a certainement pas envie d'être prise pour une vache à lait, un petit "bidouillage" suffit pour forcer la machine à faire à la fois une découpe mi-chair pour les stickers, et une découpe pleine-chair pour le contour de notre planche de stickers. Pour ce faire, il a fallu régler la puissance de découpe sur le minimum, pour assurer une découpe mi-chair, puis superposer les formes de découpe pleine-chair, de façon à forcer la machine à effectuer plusieurs ages, pour finalement découper complètement notre feuille. Manipulation qui pourrait être faite beaucoup plus simplement si nous avions accès gratuitement à la fonctionnalité "Stickers", qui permet d'indiquer à la machine deux pressions différentes de découpe sur une même feuille.

Alors en effet, à force de tricher, il est possible d'atteindre le résultat souhaité. Mais au temps d'anticipation et de réflexion intense s'ajoute le temps de réalisation de la découpe. La Joy Xtra annonce une vitesse de découpe de 14 centimètres par seconde. Mais ne vous laissez pas impressionner par cette belle promesse, car cette vitesse n'est valable que pour une découpe simple, en ligne droite, par exemple. Pour des découpes plus précises, évidemment, il faut compter plus de temps. À titre d'exemple, découper les deux planches de stickers visibles sur la photo ci-dessus a nécessité 10 minutes.

Cricut Joy Xtra : une précision variable

Et si nous pensions naïvement que nous pourrions profiter de ce temps de réalisation pour faire autre chose, et nous fier entièrement à la machine pour réaliser notre projet, nous avons hélas découvert une nouvelle ombre au tableau. Parlons maintenant de la précision de la Joy Xtra. Si nous avons pu être épatés plusieurs fois par certains résultats de découpe, il est important de garder en tête que la machine manque de fiabilité et de constance dans sa précision, et ce, malgré des calibrages précis et réguliers.

Pour l'exemple, là encore, lors d'une séance de découpe de quatre planches de stickers, la planche 1 a été parfaitement découpée : les marges autour des illustrations de timbres sont égales. La planche 2 quant à elle, découpée quelques minutes après dans une même session, présente des marges complètement inégales. Les planches 3 et 4, toujours dans la même session, sont ressorties parfaitement.

Deux planches de stickers à la précision inégale © Léna Mée - Lenacadabra

Ces décalages sont assez communs dans l'univers des machines de découpe, mais peuvent être extrêmement frustrants, surtout lorsque la matière première a un certain coût et que le produit fini est inutilisable. De fait, alors qu'on pourrait espérer se libérer un peu de charge mentale en confiant un travail minutieux à une découpeuse tout en s'occupant d'autre chose à côté, on a plutôt tendance à avoir les yeux rivés sur la machine, la boule au ventre, pour s'assurer que la découpe s'effectue correctement. Et si ce n'est pas le cas, annuler la découpe mène souvent à des bugs : le tapis reste coincé, on ne peut pas relancer la découpe… Bref, encore des soucis liés au Design Space qui méritent d'être corrigés par Cricut au plus vite.

Après investigation auprès de différents utilisateurs, nous n'avons pas trouvé une réponse satisfaisante à ces problèmes de fiabilité et de précisions. Des pistes de réflexion peuvent cependant être étudiées : l'éclairage de la machine, comme évoqué au début de cet article, est important et ce, même si la Cricut est équipé d'une petite lumière intégrée.

En effet, avant toute découpe en "print and cut", la machine va venir scanner les repères imprimés aux quatre coins. On peut supposer qu'un mauvais éclairage ou un reflet malencontreux puisse perturber légèrement la lecture de ces repères, et donc la découpe qui s'ensuit. Autre piste possible : le mouvement du tapis de découpe. Celui-ci est maintenu par des petites encoches, très sensiblement plus larges que le tapis lui-même. Peut-être alors qu'en faisant er le tapis d'avant en arrière, un petit décalage se créée ? Ces questions restent en suspend, de notre côté nous préférons conseiller de se préparer mentalement à perdre de la matière première parce que comme toute machine, il lui arrive de faire des loupés.

Cricut Joy Xtra : un tapis de découpe à protéger

Parmi les petites choses à savoir, notamment sur le "print and cut", notons que les marques des rouleaux qui font glisser le tapis de découpe peuvent abîmer légèrement les s. Des traces sont apparues plusieurs fois lors de nos tests.

© Léna Mée

Concernant les tapis de découpe, ils existent en plusieurs "puissances d'adhérence" – le "grip" en anglais. Ils sont fournis avec une petite feuille de protection à placer sur la face collante pour la protéger entre les utilisations. Cependant, même en étant précautionneux, ces tapis se salissent à vitesse grand V. Et très vite, nous nous sommes retrouvés avec une salade composée de cheveux, de poussières, de peluches de vêtements et poils d'animaux : un mélange qui a fait perdre toute son adhérence au tapis. Nous avons terminé notre test en fixant nos matériaux avec un bout de ruban adhésif, mais sachez que la fabuleuse communauté Cricut propose là encore de nombreux tutoriels pour nettoyer les tapis en profondeur et retrouver leur adhérence d'antan.

© Léna Mée - Lenacadabra

Cricut Joy Xtra : une découpeuse handicapée par son logiciel

Au final, Cricut fait une belle promesse et propose des machines puissantes et plutôt précises qui ouvrent le champ des possibilités créatives. Cependant, en terme de tarifs, la marque de situe dans la fourchette élevée pour cette gamme de produits, et il faut s'attendre à débourser plus que le prix de la machine.

La Joy Xtra promet de découper plus de 50 matériaux à retrouver sur la boutique Cricut, mais il est tout à fait possible d'utiliser ses propres matériaux, de façon raisonnable et responsable (on ne peut pas découper du bois avec ce modèle, comme Cricut le précise). Au-delà des matériaux, certaines fonctions ou formes de découpe sont payantes, comme chez Canva.  Un business model à la mode, mais très discutable.

On l'aura compris, le gros point faible de Cricut, c'est son logiciel, Design Space, qui mériterait vraiment une refonte en profondeur, pour une utilisation simplifiée, intuitive et ergonomique, dans la continuité de ce qui existe ailleurs, et qui a fait ses preuves. Nous avons sincèrement eu l'impression qu'il n'avait pas été validé et utilisé par des créatifs en amont, alors qu'ils représentent l'essentiel de la cible de l'entreprise.

On peut d'ailleurs se demander si Cricut se soucie réellement de la vie des créatifs, quand on sait que la marque a participé à la "trend" IA du "starter pack" avant de très vite faire marche arrière en réalisant qu'elle était en train de se mettre sa communauté à dos. Pour rappel, cette tendance – heureusement disparue aussi vite qu'elle était apparue sur les réseaux sociaux – consistait à utiliser l'intelligence artificielle pour générer une illustration avec un personnage emballé sous blister avec ses accessoires caractéristiques : pratique qui, en plus de nuire considérablement à l'environnement, représente du vol pur et dur du travail des artistes qui pour beaucoup, ont fait confiance à la marque en se procurant une de leurs machines.

Quoi qu'il en soit, en dehors de ces questions éthiques, la Joy Extra reste une bonne petite machine à découpe qui suffit pour des travaux simples. Elle convient bien à des particuliers ionnés qui veut matérialiser des projets à domicile en toute autonomie. Pour aller plus loin, avec des réalisations personnalisées plus professionnelles et notamment la fonction "print and cut", mieux vaut s'armer de patience et prévoir un stock de camomille en attendant que Cruct se décide à revoir son logiciel de façon à exploiter vraiment les nombreuses possibilités de ses machines.